lundi 26 novembre 2007

Anniversaire du 14 juillet célébré en 1792, par Mme de Staël


COMMEMORATION DE LA PRISE DE LA BASTILLE, PAR PRIEUR

Les marseillais envoyés au Champ de Mars pour célébrer le 14 juillet portaient écrit sur leurs chapeaux déguenillés : Péthion, ou la mort ! Ils passaient devant l' espèce d' estrade sur laquelle était la famille royale, en criant : vive Péthion ! Misérable nom que le mal même qu' il a fait n' a pu sauver de l' obscurité ! A peine quelques faibles voix faisaient entendre : vive le roi !
Comme un dernier adieu, comme une dernière prière.
L' expression du visage de la reine ne s' effacera jamais de mon souvenir : ses yeux étaient abîmés de pleurs ; la splendeur de sa toilette, la dignité de son maintien contrastaient avec le cortége dont elle était environnée. Quelques gardes nationaux la séparaient seuls de la populace ; les hommes armés, rassemblés dans le champ de mars, avaient plus l' air d' être réunis pour une émeute que pour une fête. Le roi se rendit à pied, du pavillon sous lequel il était, jusqu' à l' autel élevé à l' extrémité du Champ de Mars.
C' est là qu' il devait prêter serment pour la seconde fois à la Constitution, dont les débris allaient écraser le trône.
Quelques enfants suivaient le roi en l' applaudissant ; ces enfants ne savaient pas encore de quel forfait leurs pères étaient prêts à se souiller.
Il fallait le caractère de Louis Xvi, ce caractère de martyr qu' il n' a jamais démenti, pour supporter ainsi une pareille situation.
Sa manière de marcher, sa contenance, avaient quelque chose de particulier ; dans d' autres occasions, on aurait pu lui souhaiter plus de grandeur ; mais il suffisait, dans ce moment, de rester en tout le même pour paraître sublime.
Je suivis de loin sa tête poudrée au milieu de ces têtes à cheveux noirs ; son habit, encore brodé, comme jadis, ressortait à côté du costume des gens du peuple qui se pressaient autour de lui. Quand il monta les degrés de l' autel, on crut voir la victime sainte s' offrant volontairement en sacrifice.

Il redescendit, et, traversant, de nouveau les rangs en désordre, il revint s' asseoir auprès de la reine et de ses enfants.
Depuis ce jourle peuple ne l' a plus revu que sur l' échafaud.


Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, par madame de Staël-Holstein.



MADAME DE STAEL, PAR FIRMIN MASSOT

Liens et copies :

http://www.stael.org/biblio.php?op=viewbook&cid=32&min=30&orderby=auteurA&show=15

http://bpun.unine.ch/page_bleu2.asp?sous_menu1=icono

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